vendredi 30 juillet 2010

Paupérisation, précarité et flexibilité

"La générosité de la Scop va continuer d'exister même si le statut n'existe pas. " De qui cette jolie sentence ? De "laVoixdesonmaître" lui même ! Il l'a prononcée en comité d'entreprise le 21 mai 2010 (le compte-rendu officiel en fait foi).
A l'image des "gentils ch'tis" - qui le rémunèrent grassement pour cela-, il pratique la politique de façade.
Le texte de l'accord sur la grille de classifications des journalistes confirme le décalage entre le discours et les actes. Il suffit de le lire pour comprendre pourquoi la CFDT ne l'a pas signé.

Fidèle à la ligne de conduite adoptée dès les premières réunions de négociations par tous les syndicats de journalistes du journal, la CFDT exigeait d'entrée une grille de salaires identiques à celle de nos confrères lillois. Pour reprendre une expression de "laVoixdesonmaître" : ce n'était pas négociable.

La CFDT a fait la démonstration (lire "Une mesquinerie à 6 000 euros") qu'une grille qui démarrait à l'indice 140 de la PQR n'avait guère d'incidence sur la masse salariale à condition, entre autres, d'encadrer les hauts salaires. Sur cette base, la CFDT était prête à des concessions sur les autres dispositions de la grille. Encore eut-il fallu que nous en discutions. Mais visiblement la direction nous avait écarté du dialogue.
Dans le contexte économique actuel, la CFDT n'accepte pas une paupérisation de la rédaction. Si on écoute le chant des sirènes, on peut s'estimer heureux d'avoir obtenu beaucoup plus que ce qui nous était proposé au départ. C'est une vieille technique de négociation qu'affectionne "laVoixdesonmaître" : il vous fait des propositions ridiculement basses qu'il amende à chaque nouvelle rencontre. Au final, ce faux généreux reste en-dessous du minimum acceptable.
Les journalistes du CP ne travaillent pas moins que ceux de la VdN. D'ailleurs pour augmenter notre temps de travail, "laVoixdesonmaître" nous a aligné sur celui de nos confrères lillois. Cela ne lui a posé aucun problème. Nous étions même dans une logique de groupe. Une logique qui a disparu dès qu'il s'est agi de parler rémunérations.
L'accord ayant été signé par deux syndicats, il va s'appliquer à compter du 1er août 2010. La CFDT va désormais se battre pour que le travail pour le journal du 7e jour soit payé double.

Cet accord est mauvais parce qu'il ne fixe pas un effectif minimum de la rédaction. Dans le contexte Scop, nous étions 92. Combien serons-nous demain ?
Impossible de répondre. L'effectif évoluera selon le bon vouloir de la direction qui maintiendra un volant de CDD corvéables à merci. En plus de la paupérisation, l'accord introduit la précarité et la flexibilité. La promesse de 87 journalistes ne signifie en rien 87 CDI.

L'accord définit une organisation de la rédaction basée sur des intérêts particuliers et non sur une ambition collective. La CFDT a fait des propositions afin de rectifier le tir. Elles ont, bien entendu, été rejetées.
Le contenu du journal importe peu à "laVoixdesonmaître". Il constate chaque jour une érosion des ventes mais encourage le moins disant rédactionnel. Une dégradation qui va s'accentuer avec la suppression des secrétaires de rédaction. Les futurs "pilotes" (encore un truc qui nous vient des Ch'tis) n'auront pas tous l'expérience et la compétence pour accomplir les tâches de mise en page.
Les dégâts ne tarderont pas à se faire sentir.

Pour la CFDT, la relance des ventes ne passe pas uniquement par une nouvelle formule (qui entre parenthèses s'accompagnera début 2011 d'une augmentation de prix), mais par un journal plus ambitieux au plan rédactionnel. Et ce n'est pas avec des salaires au ras des pâquerettes qu'on motivera les nouveaux confrères.

Si cet accord maintient un certain nombre d'acquis pour les journalistes recrutés du temps béni de la Scop, il est par contre très inquiétant pour les 25 journalistes qui devraient renforcer une rédaction exsangue après 32 départs en clause de cession.

mercredi 28 juillet 2010

L'accord sur la grille de classifications

Deux syndicats de journalistes ont signé à ce jour l'accord sur la grille de classifications des journalistes du CP : la CGT (qui en a finalement informé la rédaction le jour même où nous nous étonnions de son silence) et FO.
Avant d'entamer la lecture du polar de l'été sur la plage, la CFDT vous propose de vous plonger dans les six pages qui vont conditionner votre avenir au journal.
A l'inverse du polar, il n'y a pas de suspense et les coupables sont connus dès les premières lignes.

https://docs.google.com/fileview?id=0B0lyteEeduQjZjRjMTc0YmQtZGNkZi00NzIyLThmN2EtYzJkZWFmODhjNDdl&hl=fr&authkey=CL3Uk44B

Une mesquinerie de 6 000 euros

L'accord sur "la grille de classifications des journalistes" du CP a été signé le jeudi 22 juillet 2010 par la CGT qui, faute de temps sans doute, n'en a pas encore avisé la rédaction.
Cette signature vient briser une unité syndicale jusqu'alors soudée autour d'une revendication commune : nul journaliste ne peut être embauché en deçà de l'indice 140 (grille PQR), soit 2 313 euros.
Cette revendication n'a rien de scandaleux dans la mesure où il s'agit d'appliquer la même grille de salaires au CP qu'à la VdN. Après tout, n'appartenons-nous pas tous à cette même grande maison ch'ti ? D'autant que notre demande restait raisonnable.

Additions et... soustractions
La CFDT a sorti sa calculette et fait les additions. A leur lecture, on comprend pourquoi la direction a refusé d'entrer dans les détails lors des négociations et pourquoi elle était pressée d'en finir avant le 1er août 2010.
Compte-tenu des 32 départs en clause de cession et des 25 embauches minimum - nécessaires en contrepartie -, l'application d'une grille salariale débutant à l'indice 140 ne représente que 360 points d'indice supplémentaires, soit moins de 6 000 euros par mois en masse salariale.
Une misère pour une direction qui rémunère un rédacteur en chef à l'indice 447 de la presse parisienne (au lieu de 333 sur la grille), soit 1 793 euros de plus, et qui, dans l'accord qu'elle a rédigé, n'a guère de scrupule à placer à l'indice 270 PQR (4 460 euros) son "rédacteur en chef délégué". Non seulement ce titre n'existe pas mais le poste officiel de "rédacteur en chef adjoint" cumule à l'indice 250 (4 131 euros).
Pourquoi ce cadeau ? Tout simplement parce que le RECD (désolé pour ce sigle sorti de l'imagination des "gentils ch'tis) ne pouvait pas émarger à un indice inférieur à celui d'au moins un des 2 "adjoints au rédacteur en chef".
Afin de satisfaire cette belle hiérarchie, les rédacteurs de base sont priés de se serrer la ceinture. Travaillez plus (moins de RTT, des dimanches payés comme des lundis), gagnez beaucoup moins et silence dans les rangs !
Leçon de calcul
Afin de bien mesurer la réalité de la masse salariale de la rédaction, la CFDT s'est livrée à quelques opérations comptables.
En mars 2010, sur la base de 93 journalistes, le coût de la rédaction était de 16 728 points d'indice Presse parisienne (15,73 euros le point). Soit 263 131 euros.
Les 32 départs enregistrés à ce jour représentent 5 894 points d'indice, soit 92 715,62 euros.
Au 1er août 2010, ceux qui sont restés, et qui seront toujours payés au tarif parisien, représenteront 10 834 points (soit 170 418 euros).
Les recrutements, eux, vont se faire sur la base de la PQR. Nous les estimons à hauteur de 3 060 points (soit 50 551 euros).
Un calcul rapide permet de constater que la rédaction "ch'ti" coûtera 42 161 euros de moins que la rédaction scop. Une estimation basse ! Elle ne tient pas compte de l'ancienneté des partants et de différents autres critères qu'une direction se garde bien de communiquer aux représentants syndicaux.

lundi 19 juillet 2010

Ultimatum

L'ultimatum est fixé au lundi 26 juillet 2010. Les syndicats de journalistes ont encore une semaine pour signer l'accord sur la grille de classification salariale, présenté par la direction.
Une direction guère inquiète pour l'avenir de son texte puisqu'un syndicat (la CGT) devrait donner son aval.
La CFDT, quant à elle, ne le paraphera pas en l'état actuel.
Deux raisons principales justifient notre position.
1 - En février 2010 quand s'est ouverte la première réunion de négociation, tous les syndicats de journalistes revendiquaient l'instauration d'une grille de salaire identique à celle de nos confrères de la VdN. A savoir pas de rémunération inférieure à l'indice 140 (2 329 euros). Nous n'avons pas changé d'avis.
La CFDT est ouverte à toute discussion sur l'évolution de la grille à condition qu'elle démarre sur un indice décent et non à l'indice 120 (1996 euros) comme l'exigent les "gentils ch'tis".
Les dernières réunions de négociation début juillet n'ont pas permis d'avancer sur le fond. "laVoixdesonmaître" n'a accepté que quelques petites évolutions.
2 - La CFDT conteste la dénonciation par la direction de la grille de salaires en vigueur du temps béni de la scop (grille parisienne) parmi les usages. Pour nous, il est évident que la grille de salaires de la presse parisienne figure bien parmi les accords dénoncés (et non les usages).
"laVoixdesonmaître" a subtilement mélangé "accords" et "usages" dans sa lettre recommandée du 21 janvier 2010 adressée à chaque salarié. La manoeuvre lui permet d'embrouiller tout le monde.
La CFDT a saisi l'inspection du Travail, fin juin. Mais en cette période estivale, les salariés de la Direction départementale du Travail ont aussi droit à des vacances.
En invoquant les "usages", les "gentils ch'tis" entendent mettre en place une nouvelle grille salariale le 1er août 2010 (six mois après la dénonciation). L'été est toujours propice aux coups fourrés.
Par contre, les accords dénoncés le 1er février 2010 restent en vigueur 15 mois soit jusqu'au 30 avril 2011. Ce qui ne fait pas les affaires de "laVoixdesonmaître". Le succès de la clause de cession (32 départs) l'oblige à recruter. Et il voudrait bien le faire au tarif le plus bas. Celui qu'il a fixé dans son nouvel accord.
La CFDT risque de contrarier ses projets.