"Merci d'appliquer sans états d'âme le processus demandé." Quand un adjoint au rédacteur en chef, à court d'arguments, s'exprime, c'est sans ambiguïté. On ne discute pas les ordres dans une rédaction aux mains du groupe Rossel-Voix du Nord.
L'histoire mérite d'être contée tant elle témoigne de la mise sous l'éteignoir de la rédaction du Courrier picard depuis cinq ans.
En cette fin d'année, les rédactions préparent leurs palmarès des hommes et femmes de l'année qui feront les choux gras d'un début janvier généralement creux en actualité. Ces palmarès sont l'occasion de faire participer les lecteurs. Un bulletin de vote leur est proposé via le journal papier et, progrès oblige, le web.
Un mail d'un de ces "adjoints", daté du 3 novembre 2015, invite donc les responsables d'agences locales à reconduire l'opération. Avec une nouveauté : "Pour les votes, le choix de l'entreprise est de les demander aux lecteurs uniquement sur le web".
Déjà l'expression "choix de l'entreprise" a de quoi choquer tout journaliste qui se respecte. On pensait naïvement que ces choix émanaient de la rédaction et du rédacteur en chef. Que nenni ! Dans le monde de Rossel-VdN, la rédaction n'a pas son mot à dire. Seuls les cadres savent et décident. Ce "choix de l'entreprise" vient, selon notre affidé, d'un mystérieux "comité de coordination" dont personne n'a entendu parler.
Un chef d'édition a contesté la décision, rappelant qu'il avait recueilli 169 bulletins papier l'an dernier, et que tous les lecteurs n'avaient pas accès à Internet. Mal lui en a pris d'autant qu'il a aussi eu l'outrecuidance de demander "un seul argument valable" pour écarter les lecteurs qui achètent encore le journal.
Le grand chef a alors fait péter ses galons. "Nous ne pouvons que clore ce débat", lui a-t-il répondu, ajoutant qu'"avec les arguments (ndlr : lesquels ?) de la rédaction, de la promo, de la pub, des ventes, le directeur général a tranché." Circulez, y'a rien à voir et "merci d'appliquer sans états d'âme, le processus demandé".
La CFDT dénonce ce comportement. La réaction du chef d'édition était de bon sens, argumentée et participait du débat naturel dans une rédaction digne de ce nom.
La CFDT en appelle au rédacteur en chef. Elle a mis ses espoirs en cet homme de terrain, lors de sa nomination en mai dernier, pour que cessent ces pratiques et qu'un dialogue normal soit rétabli. Elle lui demande de ne pas fuir ses responsabilités et de montrer clairement la ligne qu'il entend suivre.
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